Alain Accardo publiait, en 2003 (édition actualisée et augmentée en 2009 chez Agone), Le petit-bourgeois gentilhomme.
La moyennisation de la société, aux Éditions Labor (dispersées aujourd'hui).
En décembre 2002, dans un article du Monde diplomatique, intitulé Le double jeu des classes moyennes, il dressait déjà un constat sévère sur la difficulté des classes moyennes à se mobiliser pour changer un monde dans lequel elles trouvaient d'énormes avantages tant matériels que symboliques.
Extraits de l'article :
« (...) il semble difficile d’imaginer que les classes moyennes, en dehors de minorités par moments plus radicales, puissent se mobiliser contre le système au point de mettre son existence en péril. La contestation, qui peut s’exprimer parfois sous une forme violente, est en général une contestation dans le système et non une contestation du système. D’où le succès que rencontrent dans ces populations les différentes variantes (de droite et de gauche) de la pensée néoréformiste, qui ont en commun de considérer que tous les aspects du fonctionnement du système peuvent être légitimement discutés, mais que le principe même de son existence doit rester en dehors des limites de la discussion légitime. (...) Il faut insister sur cet aspect des choses, et particulièrement sur le fait que, en accomplissant ce travail de maintien de l’ordre symbolique indispensable au règne des puissants, les cadres et autres auxiliaires de la domination parviennent à se convaincre qu’ils défendent vraiment des valeurs universelles de liberté, de justice et d’humanité. Ils n’ont pas, sauf cas particulier de cynisme, le sentiment, ni a fortiori la volonté, de servir un système d’exploitation, d’oppression et de corruption puisque à leurs yeux ce système, pour autant qu’il fasse l’objet d’une réflexion explicite, est globalement bénéfique, conformément au credo du catéchisme néolibéral dont ils sont imprégnés. (...) Précisément, ce qui fait la force de l’ordre établi, c’est qu’il n’est pas seulement établi à l’extérieur des individus, mais qu’il est installé en même temps dans leur tête, dans leurs tripes, inviscéré, incorporé, devenu chair et sang, conscience et surtout inconscient. De sorte que, pour le servir, il n’est pas nécessaire d’y réfléchir expressément, il suffit au contraire de se laisser porter par la spontanéité de ses habitudes et la logique de ses investissements. Ce qui demande un effort pénible, ce n’est pas de penser dans et avec la logique du système, mais de penser contre, c’est-à-dire contre ses propres conditionnements. Un tel travail de socioanalyse est assez difficile à effectuer. Peu de gens l’entreprennent et parmi ceux qui l’entreprennent, peu ont la constance de le poursuivre. Sans doute parce qu’il change peu ou prou la vie de l’intéressé, en dérangeant les petits accommodements passés avec le monde. (...)La culture des classes moyennes, dont la presse, quotidienne et magazine, se repaît tout en la thématisant, fournit une espèce de prêt-à-penser témoignant en fait de la démission d’une pensée qui prend acte de ce que le monde est devenu, comme si l’histoire avait atteint son stade terminal et qu’il n’y avait plus rien d’autre à faire qu’à aménager et gérer l’existant, ici et maintenant, le plus esthétiquement possible. La vacuité théorique et l’indigence philosophique de la vision médiatique de l’histoire n’ont d’égales que celles de la vision de l’établissement politique en général. (...)»> Trois textes d'AA réunis en brochure (pdf),
offerte par les Renseignements généreux.> Son blog sur le site des éditions Agone, ICI.
> Un entretien (2002) du Passant Ordinaire avec AA à propos de son livre De notre servitude involontaire, lettre à mes camarades de gauche, paru en 2001, ICI.
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