• "Sur quelques communautés à perspective émancipatoire et la question de l’argent".
• "Les communautés entre elles ou quelques préalables à l'usage d'un concept ambigu : la communauté (avec un long encadré sur le mouvement communautaire français des 70ies)".
• Le numéro se termine par un tableau pratique résumant les spécifités des communautés traitées.
"(...) Suffit-il (...) de détruire l’Etat, d’invoquer les catégories heideggeriennes et nihilistes de la théorie du «Bloom», ou d’attendre la marée basse d’une « crise de la valeur » pour poursuivre le projet de l’auto-institution d’une individualité et socialité libres ? « Un édifice social, fondé sur des siècles d’histoire, ne se détruit pas avec quelques kilos de dynamite » (Kropotkine, journal La révolte, 1891), quelle que soit l’impatience que nous avons à voir s’écrouler un monde tous les jours plus absurde. On ne peut lui échapper nous semble- t-il en rejouant la musique d’un romantisme révolutionnaire de la barricade quoique nous puissions nous y retrouver à l’occasion, mais en construisant de nouveaux rapports auto-organisés à l’endroit même où nous dispensant d’un effort commun sur nous-mêmes et sur les autres, l’Etat, la technique et le capitalisme y prospèrent inlassablement.
Sous l’emprise ordinaire de ces souffrances qui ne peuvent s’écrire qu’en langage économique, les loyers impayés équivalent à des immeubles soufflés par les bombes, et le chômage à la perte irrémédiable du goût de vivre. C’est que beaucoup regrettent encore le bon temps où l’impuissance politique s’échangeait mieux, contre de l’argent, un diplôme ou un titre de propriété. Mais, aujourd’hui, c’est marée noire sur les plages jadis insouciantes de la modernisation rieuse des trente dites « glorieuses ». Quand le repli ordinaire sur son activité rémunérée valait comme participation à une augmentation abstraite des « richesses » de la population, il n’y avait en effet pas nécessité de vivre réellement ensemble au-delà de l’îlot familial, amoureux ou solitaire, compensant pour le reste un océan de relations fonctionnelles et de délégations.
Nous pensons au contraire que ce que l’on peut réaliser par goût et par affinité croise ce qui peut être utile matériellement et à tous pour survivre. Et qu’il devient donc nécessaire de briser l’éclatement de nos vies pour reconstruire une unité de lieu collective sur le temps long de leur reproduction. Il n’y a guère d’autre stratégie possible que de se regrouper pour commencer, pourvu que les limites du groupe soient suffisamment lâches pour garantir la liberté de chacun d’y entrer ou d’en sortir, et suffisamment consistantes pour que de tels collectifs puissent étendre le domaine de leur subsistance au delà des limites familiales actuelles. (...)"
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