12/11/2014

La révolution des concombres tordus

Article de Campagnes solidaires (n° de sept. 2014)
repris par BastaMag, 7 novembre 2014 (extraits) :

GartenCoop, une ferme solidaire, 
autogérée par les agriculteurs et les consommateurs
GartenCoop

(...) Ces cinq dernières années, une centaine d’initiatives sont nées, avec un modèle qu’elles nomment « agriculture solidaire » (SoLaWi, comme Solidarische Landwirtschaft). Ce modèle s’inspire clairement des expériences d’«agriculture soutenue par la communauté » (ASC) existantes en Amérique du Nord, ou des Amap (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne) en France. L’idée est qu’une communauté de personnes porte la responsabilité d’une exploitation locale et se partage la récolte au rythme hebdomadaire. La communauté s’engage à financer à l’avance les coûts de l’agriculture et à partager les risques.

C’est ce qui se passe à la GartenCoop de Fribourg, dans le sud de l’Allemagne, ville célèbre pour ses initiatives écolos. En 2009, un noyau de vingt paysans, militants, étudiants et activistes écologiques décident de prendre en main leur alimentation, au pied de la Forêt Noire, à quelques encablures de Colmar. Inspirés d’abord des Jardins de Cocagne, à Genève, ils créent une ferme solidaire. Après deux ans à la recherche de terres, la production de légumes débute en février 2011.

La coopérative cultive aujourd’hui neuf hectares dont un tiers en maraîchage, un tiers en céréales et le dernier tiers en « engrais vert » (plantes éphémères à croissance rapide qui retiennent les éléments nutritifs du sol). Elle compte cinq maraîchers travaillant à 80 % et nourrit 290 foyers, soit environ 600 personnes. La totalité des récoltes, quel que soit le calibre, est distribuée à l’ensemble des membres. La philosophie est autogestionnaire : le but est d’arriver à un partage des responsabilités, une idée pas très compatible avec le libre-marché...

Chaque participant choisit la hauteur de sa contribution financière aux charges annuelles. Ceux qui ont des revenus faibles vont payer un peu moins, ceux qui le peuvent paieront un peu plus. L’objectif est qu’au moment de faire le bilan, la somme des contributions corresponde à la totalité des dépenses prévues. Cela permet aux paysans d’avoir plus de sécurité, ainsi qu’un salaire décent. En même temps, une communauté très hétérogène peut participer, indépendamment de ses moyens économiques.

(...) Les membres de la coopérative s’engagent à s’investir dans les tâches de la ferme à hauteur de cinq demi-journées par an. Ainsi, tous les mercredi et jeudi matins, une poignée de membres viennent à la ferme pour aider aux récoltes et au désherbage, en fonction de leurs moyens. La confiance prend le pas sur le contrôle. Ce qui compte, c’est que les tâches soient accomplies. Le gros de la coordination se fait à travers un site Internet auquel tous les coopérateurs ont accès.

(...) Depuis la naissance de GartenCoop en 2011, deux autres projets ont été initiés dans la région de Fribourg. Près d’un millier de personnes vont bientôt faire partie d’un nouveau réseau participatif et solidaire d’alimentation écologique, autogéré localement. La coopérative travaille également à l’intégration d’un paysan-boulanger en son sein.

Petit à petit, en continuant de faire ce qui est faisable, les animateurs de la Gartencoop développent « la stratégie des concombres tordus ». Il s’agit de la construction de communautés solidaires, diverses et radicales ; ainsi que de la sauvegarde d’une agriculture paysanne qui, en Allemagne, est menacée de disparition. L’agriculture du futur doit être capable de formuler des buts paraissant utopiques. Sinon, les compromis nous tuent. Même si c’est écrit bio dessus. (...)

> Le site de GartenCoop.
> Voir ou acheter le DVD du documentaire
tourné au GartenCoop La stratégie des concombres tordus.
> Lire un compte-rendu de Urgenti (Réseau international des initiatives d’agriculture
soutenue par la communauté).
> Ecouter la présentation de GartenCoop (en français).

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