05/03/2014

Les banques se dégonflent pour
les soutiens-gorges de la SCIC des Atelières

Communiqué
Les Atelières (ex-Lejaby) mettent fin à leur aventure
C’est avec une grande tristesse que j’ai décidé de mettre fin à l’aventure des Atelières un peu plus d’un an après l’ouverture de l’atelier. C’est un crève-cœur pour celles et ceux qui ont eu l’espoir de relancer un atelier de lingerie corseterie haut de gamme. Nous avons engagé nos démarches auprès du Tribunal de commerce de Lyon auprès duquel nous demanderons la liquidation de notre société coopérative d’intérêt collectif. Le rendez-vous administratif est fixé à vendredi 7 mars à 9h30.

Trois raisons nous ont amenés à prendre cette décision douloureuse :
1- le refus des banques de nous soutenir
Nous avons appris, mercredi soir, que deux banques refusaient de consolider les financements prévus par le préfet de Région via les fonds de revitalisation. Notre plan de recapitalisation en trois volets était cohérent. Un volet « privé » (soit 250 000 euros quasi acquis), un volet « fonds de l’économie sociale et solidaire » (soit 200 000 euros en bonne discussion), un volet « fonds de revitalisation » (soit 585 000 euros). Ces fonds de revitalisation nécessitent un accord tripartite entre l’Etat (c’était acquis), des entreprises de plus de 1000 salariés qui licencient et qui doivent abonder à ces fonds (deux entreprises avaient donné leur accord) et des banques qui font l’avance pour ces entreprises (deux banques s’y sont opposées). Cela remet en cause l’ensemble du montage financier.
Dans notre pays, les banques sont plus fortes que la République. Avec notre argent, elles exécutent chaque jour des dizaines de PME. Ce sont Les Atelières qui montent aujourd’hui à la guillotine.

2 – le mépris pour les savoir-faire humains : les dispositifs d’innovation, en partie portés par la Banque publique d’investissement, sont centrés sur la robotisation
Nous avons étudié tous les dispositifs liés à l’innovation dont nous pouvions bénéficier en particulier via la nouvelle BPI. Nous ne relevons d’aucun d’eux car ces dispositifs privilégient :
A – l’innovation technique : or, nous avons travaillé sur de l’innovation organisationnelle, notamment en recherchant un modèle propre à la fabrication des petites séries du luxe,
B – l’intervention d’ingénieurs : si nous avons avec nous, depuis septembre, un ingénieur INSA qui a réalisé un travail formidable avec des résultats, notre recherche a reposé sur l’intervention d’un personnel disposant de CAP ou BEP, diplômes non reconnus au titre de l’innovation.

Dans notre pays, les personnes valent moins que les robots. Quant à la BPI, malgré les bonnes intentions politiques, elle est l’instrument des grands groupes, non pas des PME. Or ce sont les PME qui créent l’emploi en France. Ceux qui, comme moi, ont espéré en la BPI ont été leurrés.

3 – une filière anéantie et peu capable de se « réinventer »
Nous avons souffert de la désorganisation de la filière corsetière et textile et des marques :
A – absence de matières premières en circuit-court : les commandes de tissus et de fournitures se font souvent à l’étranger avec des délais toujours aléatoires dont nous sommes dépendants,
B – négociations difficiles sur les prix : les habitudes de payer des services à bas coût au Maghreb et en Asie faussent les relations entre clients et fournisseurs. Les marques n’ont pas su réinventer leur process de mise en fabrication, continuant à s’appuyer sur les modes opératoires de la grande production même pour le luxe,
C – marges énormes et diktat des circuits traditionnels de distribution, très contraignants pour les marques.
Dans notre pays, la fabrication française est un grand mensonge. Les produits « made in France » sont souvent conçus à l’étranger et finalisés en France. Tous les jours, des consommateurs sont bernés par l’étiquette « made in France » qui est une norme a minima et le cache-sexe médiatique d’un pays qui a abandonné ses métiers. (...)
Si près du but, ainsi s’achève notre belle aventure. Nous avons été soutenus par plusieurs milliers de Françaises et de Français qui ont cru en nous — tout particulièrement nos associé(e)s qui n’auront tiré aucune rémunération de leur investissement. Nicole Mendez aura joué un rôle considérable, apportant sa connaissance de la filière et du savoir-faire. Mais nous aurons été le pot de terre contre le pot de fer. Je suis aujourd’hui une femme à bout, épuisée par des négociations incessantes et improductives. La vente des machines et les dernières factures à encaisser permettront de payer les fournisseurs. Je ferai tout ce qui est, en mon pouvoir, pour aider mon personnel à retrouver un emploi, ce qui sera mon ultime combat pour Les Atelières
Muriel Pernin, présidente fondatrice des Atelières, lundi 3 mars 2014

« En janvier 2013, des ex-ouvrières de Lejaby créaient les Atelières, une société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) destinée à fabriquer une lingerie corseterie haut de gamme. Très soutenues par les pouvoirs publics (Arnaud Montebourg leur avait rendu visite au lancement), elles mettent aujourd'hui fin à leur aventure, face au « refus des banques » de les soutenir. Fin janvier dernier, le photographe Patrick Artinian était allé les rencontrer. L'atelier tournait déjà au ralenti. Pour voir le port-folio » Médiapart
> Voir aussi l'article de L'Huma ou du Point.

1 commentaire:

kuriakin a dit…

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