04/03/2014

"Appel aux caisses de solidarité"

Lu sur Rebellyon :

Réunis par amitié et par cooptation, nous sommes une quinzaine de personnes à avoir constitué une « caisse de solidarité », un projet volontairement limité, fondé sur cinq principes ou règles de fonctionnement :
1 - L’affinité et la confiance (l’adhésion se fait par cooptation).
2 - Des rencontres conviviales et directes (tous les deux ou trois mois).
3 - Un petit nombre d’adhérents (pas plus de vingt personnes).
4 - Une cotisation mensuelle modeste et égale pour tous (dix euros).
5 - Un fonctionnement au consensus ou toute décision (de fonctionnement, d’utilisation des fonds disponibles…) implique l’accord ou la non-opposition de tous.

Ce projet est extrê­me­ment modeste, une goutte d’eau dans l’océan. Mais, dans sa modes­tie et son caractère secondaire et rou­ti­nier (la plu­part d’entre nous sommes inves­tis dans des enga­ge­ments et des acti­vi­tés beau­coup plus pre­nan­tes), il n’a rien de négli­gea­ble. Les mois pas­sant l’argent mis de côté finit par cons­ti­tuer une réserve appré­cia­ble
(2 400 euros par an) qui, donnée ou prêtée, peut per­met­tre de dépan­ner en cas de coup dur, et de sou­te­nir tout projet qui nous en ferait la demande.

Système d’épargne, notre asso­cia­tion en raison de ses règles et de ses prin­ci­pes
de fonc­tion­ne­ment cons­ti­tue également :
- une source concrète d’entraide et de sou­tien maté­riel et humains (com­pé­ten­ces de chacun, ser­vice divers..) débor­dant de beau­coup la seule dimen­sion finan­cière ;
- un lieu pré­cieux de dis­cus­sion et de réflexion qui permet à notre groupe d’agir et de penser col­lec­ti­ve­ment face à n’importe quel événement ou situa­tion.

Par son exis­tence même, notre caisse cons­ti­tue, à son échelle minus­cule et dans ses étroites limi­tes, une réponse au triom­phe actuel de l’indi­vi­dua­lisme et de la concur­rence que les vieilles recet­tes de l’Etat-Providence ne par­vien­nent plus à com­pen­ser ; une réponse à un monde qui tend à détruire toute soli­da­rité et qui réduit à la pau­vreté un nombre tou­jours plus grand d’entre-nous...

Au delà de ses effets béné­fi­ques, limi­tés mais non-négli­gea­bles, notre caisse, à la façon des « espions dor­mant », cons­ti­tue également une pierre d’attente (aussi longue que puisse être cette attente), les premiers pas d’une alter­na­tive au monde actuel.

« Y’en a pas un sur cent », chan­tait Léo Ferré. Et c’est bien en partie à cette affir­ma­tion néga­tive que le nom de notre caisse fait allu­sion. Et encore Ferré était-il très opti­miste. Il serait plus juste de dire qu’il n’y en a pas un sur mille ou sur un mil­lion. Sauf que, pour notre part, il s’agit, poten­tiel­le­ment, d’une affir­ma­tion affir­ma­tive : nous sommes et nous vou­lons être « Un sur cent », « Un sur dix mille », « Un sur un mil­lion » ; une caisse parmi cent autres cais­ses, mille autres, un mil­lion d’ini­tia­ti­ves sem­bla­bles ou ana­lo­gues, impli­quant chaque fois des cen­tai­nes et des mil­liers de grou­pes affi­ni­tai­res, radi­ca­le­ment auto­no­mes, où tout est dis­cuté à fond à des mil­liers ou des mil­lions d’endroits et d’où peu­vent naître des puis­sants mou­ve­ments, non de foules éphémères mais de col­lec­ti­vi­tés soli­des, expé­ri­men­tés et dura­bles, capa­bles par leur asso­cia­tion de résis­ter au monde pré­sent et de
le trans­for­mer.

Notre caisse est une goutte d’eau dans l’océan. Mais ça veut dire que dans ce fameux océan il existe également des mil­liards d’autres gout­tes, jusqu’ici sou­mi­ses, iso­lées, impuis­san­tes mais qui peu­vent à leur tour, sur de mul­ti­ples ter­rains et de mul­ti­ples façons, se cons­ti­tuer par­tout en une mul­ti­tude de col­lec­tifs soli­des, dura­bles et expé­ri­men­tés, tou­jours capa­bles de s’asso­cier ou de se désas­so­cier et de dis­po­ser ainsi de forces humai­nes et finan­ciè­res tou­jours plus impor­tan­tes : une puis­sance col­lec­tive sans appa­reil cen­tra­li­sa­teur, sans votes ni repré­sen­tants, ne dépen­dant réel­le­ment - de fait et non de droit - que des seules et libres dis­cus­sions dans chacun des col­lec­tifs cons­ti­tu­tifs de cette force col­lec­tive.

Créée il y un an, la Caisse « Un sur Cent » n’attend rien de per­sonne d’autre pour auto­ri­ser ou justifier son exis­tence, pour per­sé­vé­rer et per­met­tre les effets et les ser­vi­ces qu’elle auto­rise pour ses mem­bres comme pour tous ceux qui pour­ront faire appel à elle. Mais, cons­cients de l’apport d’autres expé­rien­ces com­pa­ra­bles ou dif­fé­ren­tes, et de la force de leur démul­ti­pli­ca­tion, nous fai­sons appel à toutes et à tous pour que nous puis­sions entrer en rela­tion, par­ta­ger nos expé­rien­ces et créer par­tout des lieux de soli­da­rité et de
résis­tance. »
Lyon, le 23 février 2014
Contact : unsur­cent (at) free.fr

Précision complémentaire d'Un sur Cent :
« Dans notre projet de caisse, il y a une idée, en dehors de l’aide (forcément modeste) qu’elle peut apporter à des individus ou des groupes. Il s’agit de multiplier (à l’infini ?) des petites caisses comparables qui toutes ensembles et parce que radicalement autonomes et affinitaires (pas de vote) peuvent devenir une puissance considérable en ressources humaines et financières sans appareil bureaucratique, sans représentation, sans élection, sans concentration. Chaque caisse est entièrement maîtresse d’elle-même, de ses décisions, de sa réflexion collective, plus facile à 15 ou 20 qu’à dix millions de cotisants à la sécurité sociale. Dans le cas où ça marcherait (la multiplication des caisses), il y aurait sûrement une multitude de problèmes nouveaux à résoudre. Mais pour le moment ça me semble très clair, très pratique et, joints à beaucoup d’autres initiatives analogues, un bon moyen de résister et de renverser le monde actuel. »

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