31/12/2012

La richesse est ailleurs !


Sorti en novembre dernier, le dernier hors-série de la revue Altermondes était consacré à « Monnaies, indicateurs : 
et si on réinventait la richesse ? ».

« Tour du monde en 52 pages des alternatives existantes… Réseau d’échange de savoirs au Kenya, le Chiemgauer en Bavière, le Sucre en Amérique latine en passant par Bristol et les expériences brésiliennes mais aussi et surtout en France où les monnaies locales et la réflexion sur de nouveaux indicateurs fleurissent en Rhône-Alpes, en Pays de la Loire, en Ille-et-Vilaine, à Toulouse… Partout l’idée est la même : permettre aux gens de se réapproprier la monnaie, de redonner du sens à l’économie et de servir le développement durable des territoires...
Au sommaire :
Grèce : la monnaie en tension. Être ou ne pas être dans la zone euro ? Le traitement de la crise grecque par les medias prend souvent des accents shakespeariens, s’inquiétant de la santé économique du pays et négligeant le fait qu’au final c’est la population qui paie le prix fort. Mais cette crise est tout aussi révélatrice de la fragilité des discours assénés par les dirigeants sur les questions monétaires et pourrait finir par conférer une vraie légitimité aux propositions alternatives.

1. DE QUELLES RICHESSES PARLE-T-ON ?
Le PIB, une vision obsolète de la richesse. Le Produit intérieur brut (PIB) est un indicateur brandi à tout va, par les politiques comme par les médias, pour diagnostiquer la bonne santé économique des sociétés. On en oublierait presque que, loin d’être un outil de mesure neutre et objectif de la réalité, il procède de conventions datées, sur lesquelles il conviendrait aujourd’hui de revenir pour pouvoir développer des politiques qui répondent aux enjeux du présent.

Daniel Santi, les racines d’un savoir.  Amazonie. Si le monde contemporain voue une foi aveugle au PIB pour mesurer la richesse, il en va autrement des peuples indigènes. Dans la province équatorienne de Pastaza, les Indiens Sarayaku défendent une autre conception des richesses et un mode de vie, menacé par la convoitise des compagnies pétrolières.

Vers de nouveaux indicateurs de richesse ? À l’heure de la crise, la remise en cause du Produit intérieur brut (PIB), comme seul indicateur de richesse, semble faire consensus.
Les apparences ne seraient-elles pas plutôt trompeuses ? Entretien avec l’économiste Jean Gadrey sur la réalité du débat international et sur la nécessité d’instaurer une démocratie des indicateurs.

Produit doux contre Dépense dure.  Canada. Au tournant du XXIe siècle, des mouvements québécois ont rassemblé des personnes en situation de pauvreté pour mener une réflexion sur la richesse. Deux nouveaux indicateurs en sont nés : le Produit intérieur doux (PID) et la Dépense intérieure dure (DID).

C’est de l’échange que naît la richesse.  Le lien est plus important que le bien. Ce postulat a priori évident, les Systèmes d’échange locaux (SEL), qui fleurissent dans toute la France depuis le début des années 1990, ont eu l’occasion de le démontrer à maintes reprises. Leur idée ? Recréer du lien social à travers des échanges de biens et de services au sein d’un circuit économique fermé et alternatif. Reportage au SEL de Paname.

« Le savoir c’est comme le feu, il se trouve chez le voisin ».  Kenya. Les systèmes d’échange ne sont pas l’apanage des pays dits riches. S’inspirant de son expérience au Burundi, où il avait expérimenté la démarche dans un camp de réfugiés rwandais, Anastase Ndekezi a créé, il y a quelques années, le Réseau d’échanges réciproques de savoirs (RERs) de Nairobi.

« Ouvrir les portes de l’imaginaire ».  Prenant appui sur le rapport de Patrick Viveret, Reconsidérer la richesse, la Compagnie théâtrale la Tribouille a créé un triptyque,
Les contes de la richesse, et des saynètes pour la rue.

2. LES OUTILS D’UNE VÉRITABLE TRANSITION
Il était une fois le WIR… Les monnaies sociales et complémentaires ne sont pas nées de la crise. En tout cas pas de celle d’aujourd’hui. En Suisse, le WIR est apparu dans les années 1930, dans le contexte de la Grande dépression. Il a perduré, continuant à soutenir les échanges entre acteurs économiques.

Des monnaies sociales et complémentaires, trois objectifsSi le WIR est leur doyenne, c’est seulement depuis les années 2000 que les monnaies sociales et complémentaires (MSC) se multiplient. Mais à quoi peuvent bien servir ces nouveaux dispositifs d’échange locaux de biens, de services et de savoirs ? Quelles en sont les finalités ? Tour d’horizon.

Et si la finalité était le bonheur ? Bhoutan. Dans les années 1970, ce petit royaume bouddhiste a choisi de redéfinir son modèle de développement en partant d’un nouvel indicateur : le Bonheur national brut (BNB). Mais, peut-on mesurer le bonheur ? Bilan.

Villes en transition, développement local.  Royaume-Uni. Né en 2006, le mouvement des Villes en Transition propose une nouvelle vision du développement local dans laquelle la monnaie devient un outil de résilience pour bâtir une société « post-pétrole ». Retour sur le Bristol Pound, une expérience qui permet de réfléchir à un modèle de monnaie de transition.

Une monnaie qui circule vaut mieux qu’un trésor en tirelire ! Allemagne. Financer un nouveau parquet pour le club de sport, soutenir les activités d’associations locales, aménager un espace détente dans une association pour jeunes mamans, autant de projets financés par une monnaie alternative… Rencontre avec Christian Gelleri, initiateur du Chiemgauer, en Bavière.

La monnaie et les comportements vertueux.  En Belgique comme aux Pays-Bas, les monnaies favorisant les éco-comportements ont démontré leur efficacité. Elles sont pourtant à manier avec précaution car il ne s’agirait pas in fine d’en venir à marchandiser les comportements responsables.

« La monnaie a la faculté fantastique de créer du lien ». Brésil. Le modèle qu’a initié la Banco Palmas, à Fortaleza, est assez unique. Pour au moins trois raisons : sa gestion strictement communautaire, sa vision territoriale du développement et l’utilisation de monnaies sociales. Mais aussi parce qu’il prouve que la monnaie peut servir le renforcement du lien social entre les habitants d’un même territoire.

Une monnaie s’enracine dans une communauté de valeurs. Par Patrick Viveret.

3. DE L’IMPORTANCE DU DÉBAT PUBLIC
« Une démarche politique avec un grand P ». Souvent initié par des groupes de citoyens, le développement des monnaies complémentaires bénéficie aussi de l’appui de collectivités locales qui y voient un moyen de développer les richesses sur leur territoire, de relocaliser l’économie et de promouvoir les comportements responsables.

La Mesure et l’expérimentation sociale.  Certains acteurs restent vigilants voire méfiants à l’encontre de la participation de collectivités et d’élus à ces dynamiques citoyennes. Entretien avec Michel Lepesant, l’un des fondateurs de La Mesure à Romans (Drôme).

« Nous avons pris notre bâton de pèlerin ». En s’engageant dans la mise en place d’une monnaie solidaire à l’échelle d’un département, le Conseil général d'Ille-et-Vilaine fait figure de précurseur.

Participation citoyenne : un indicateur de légitimité.  Les Régions Nord-Pas-de-Calais et Pays-de-la-Loire ont chacune initié, à leur manière, des consultations publiques dans le but d’élaborer de nouveaux indicateurs de richesse.

Promouvoir l’alphabétisation économique. Argentine. La participation des citoyens à l’élaboration et à la gestion d’indicateurs ou de monnaies sociales est certes indispensable, mais elle ne prévient pas, en soi, tous les écueils. Entretien avec Heloisa Primavera, fondatrice du Réseau latino-américain de socio-économie solidaire.

4. QUELLES PERSPECTIVES POUR L’AVENIR ?
Quand l’État soutient la créativité économique… Brésil. Si les monnaies complémentaires fonctionnent au niveau local, leur reconnaissance par les institutions est essentielle pour que ces initiatives prennent de l’ampleur. Depuis 2006, le gouvernement fédéral du Brésil apporte son soutien à la finance solidaire, aux banques communautaires de développement et aux monnaies sociales.

Indicateurs : les conditions d’une reconnaissance. Pour qu’un indicateur de richesse devienne un véritable outil d’accompagnement des politiques publiques, il faut que les autorités publiques se l’approprient. Cette institutionnalisation est intimement liée aux conditions d’élaboration des indices. Dans quelles circonstances peut-on envisager une reconnaissance partagée des nouveaux indicateurs ?

L’architecte, la banque et le sucre.  Equateur. Pendant longtemps, la possibilité de créer une monnaie complémentaire à l’échelle d’un continent a été considérée comme une idée insensée. Cette utopie est pourtant devenue réalité en Amérique latine où le Sucre entend libérer les pays de l’Alba de la mainmise du dollar. Entretien avec Pedro Paez, ex-président de la Commission présidentielle pour la nouvelle architecture financière régionale en Équateur.

Community exchange system L’échange par delà les frontières. Afrique du Sud. L’avènement des communications via Internet a permis l’émergence de véritables réseaux quadrillant la planète. Créé en 2003, le Community exchange system (CES) reste à ce jour le seul réseau international d’échange alternatif. Parole à son créateur, Tim Jenkin.

Des monnaies sociales, de nouveaux indicateurs, et après ? Les monnaies sociales complémentaires et les nouveaux indicateurs de richesse se multiplient et viennent questionner nos manières de penser, de construire et de vivre en société. Comment faire pour passer du questionnement à un changement plus global ? Quelles alliances construire ? Quelles articulations trouver avec d’autres outils ? »
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