et de débats ! – tirée du site UnAutreFutur.org (extraits) :
Maintien de l’ordre en anarchie (par Pierre Bance)
Comment gérer les déviances et résoudre les conflits dans une société sans État ?
Un débat esquivé et qui, faute d’apporter des réponses concrètes à des problèmes inévitables, favorise l’incompréhension, voire décrédibilise l’idée anarchiste. Causerait sa perte si, par un événement toujours possible, surgissait l’espoir
d’un autre futur. [...]
[...] Le mérite de Guillaume Goutte est de rouvrir le débat dans Le Monde libertaire.
Il fustige ceux qui refusent "de concevoir la société révolutionnaire comme une société humaine, au profit d’un monde utopique – au vrai sens du terme – où il n’y aurait plus ni déviance ni conflits, ou les hommes vivraient dans une fraternité telle qu’elle annulerait toutes les humeurs et les pathologies mentales, celles-là mêmes qui peuvent être à l’origine de transgressions sociales". Il avance l’idée que plus de sécurité n’implique pas moins de liberté, ce que serine tout État, et "qu’il est possible, si l’on s’en donne les moyens, de construire une société dans laquelle la liberté n’est pas l’ennemi de la sécurité mais son principal garant".
[...] La procédure, dans la société sans État, privilégiera la conciliation, la médiation, la transaction avant tout arbitrage ou jugement. Qu’on ne s’y trompe pas, la société capitaliste privilégie aussi ces moyens de justice. [...] La société communiste s’inspirera et développera de telles formes de résolutions pacifiques et extra-judiciaires des conflits, cependant il paraît difficile de supprimer toute phase de jugement si ces procédures sont épuisées ou inapplicables. Un exemple du quotidien qui inévitablement surgira : quand une famille estimera que la commune ne lui a pas donné le logement correspondant à ce que convenu dans une délibération communale, et que chacune des parties campera sur sa position, refusant conciliation et médiation, il faudra bien que quelqu’un tranche. La décision arbitrale ou de jugement pourra être précédée d’une instruction par une "commission d’enquête" comme le suggère Guillaume Goutte, elle devra obligatoirement, au moins dans les affaires graves, ouvrir la possibilité d’un appel, la justice anarchiste ne saurait faire moins que la justice bourgeoise. Dans la société communiste, le jugement sera un pis-aller, mais il l’est aussi dans la société bourgeoise, un adage juridique le rappelle : "un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès".
[...] Les juges seront élus avec un mandat, un mandat plus moral que précis, par l’assemblée des ressortissants de sa compétence territoriale et d’attribution ; cette assemblée pourra les révoquer à tout moment. On peut également procéder par tirage au sort parmi les citoyens et, raisonnablement, parmi des citoyens volontaires. Si l’on s’en réfère aux catégories actuelles, le juge en société communiste se définit plutôt comme arbitre puisque choisi par la collectivité et non désigné par l’État, puisque à durée déterminée et non permanent, puisque simple citoyen et non professionnel de la justice.
[...] Comme en société capitalo-parlementaire, la crédibilité de l’ordre social nouveau tiendra à l’exécution d’une conciliation, d’un arbitrage ou d’un jugement. Comment faire si la personne concernée ne respecte pas l’accord auquel elle a consenti, se soustrait à la décision qui l’a sanctionnée, et que la pression sociale n’a pas suffi pas pour la contraindre? Il faut donc penser à la mise au point de procédures d’exécution forcée qui relèveront de la justice mais seront exécutées par une police car, pour cela comme pour le maintien de l’ordre en général, la police, quel que soit le terme employé, n’aura pas disparu dans
la société anarchiste.
[...] Il faut donc, pour éviter que ne réapparaissent les travers du droit de la force régalienne, que les citoyens conçoivent une police différente, une police par élection ou tirage au sort, et qu’ils contrôlent complètement par des mandats précis et la révocabilité. Une police dont la mission sera de ne jamais intervenir quand des solutions pacifiques seront possibles, dont la seule finalité sera la protection de la population contre les faiblesses inhérentes à l’être humain.
[...] Avoir, avant la révolution, une idée du droit, de la justice et de la police est une nécessité pour que, en cas de surgissement d’un autre futur, elle ne soit pas subtilisée au peuple par les politiciens et les experts, historiquement les premiers délinquants contre-révolutionnaires. Le droit, la justice et la police constituent l’ossature de la société révolutionnaire. Trois pierres angulaires qui, si elles sont mal pensées, mal façonnées,
mal utilisées, feront que l’édifice s’écroulera pour retomber dans le marasme étatique. [...]
> De longs morceaux du texte ont été coupés pour ne pas monopoliser
l'espace de ce blog. Pour lire le texte dans sa totalité, cliquez ICI (le texte
en pdf y est également disponible).
> Le long article de Guillaume Goutte du Monde libertaire (semaine du 2 février), intitulé "L’ordre sans l’État : déviance, conflits et justice en société anarchiste", auquel il est fait référence ici, est disponible sur le site du ML.
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